Il existe deux espèces de manioc :
le manioc amer et le manioc doux (appelé ka manioc), tous deux de la famille des ‹ Euphorbiacées › (Euphorbiceae).
Leurs noms scientifiques sont :
« Manihot esculenta Crantz. » - « Manihot utilissima » pour les maniocs amers,
et « Manihot dulcis » - « Manihot opi » pour les maniocs doux,
Le mot manioc dériverait du Tupi* ‹ manioch ›.
« Selon une légende ancestrale tupi, la fille d'un chef guerrier appelée Mani, mourut à l'âge d'un an. Les larmes versées par la communauté lors de son enterrement permirent à une plante de pousser spontanément, plante aux tubercules blancs et amers qui fut baptisée ‹ Mani-oca › (maison de Mani) ».
Au Mexique (et dans la plupart des pays hispanophones), le manioc est appelé ‹ yuca › (avec un seul C), mot d'origine Taïno**.
* langue parlée par les peuples Tupi, amérindiens qui habitaient le littoral atlantique de l’actuel Brésil.
** langue parlée par les Taïnos, une ethnie amérindienne qui occupait les Grandes Antilles lors de l'arrivée des Européens au 15ème siècle
Origine
Amérique du Sud (plateau des Guyanes : Venezuela, Guyana, Surinam, Guyane et nord-est du Brésil).
Habitat
Le manioc était déjà cultivé, comme aliment de base, au Pérou il y a 4000 ans, ainsi qu'au Mexique (2000 ans). Vers 700 à 500 avant JC, les Huécoïdes originaires des Andes, arrivent en Guadeloupe et y apportent le manioc. Ils partent ensuite vers Porto-Rico.
Les Arawaks dont le manioc était la nourriture principale et surtout les Caraïbes le diffusèrent dans tout l'arc antillais puis sur le continent américain.
Le manioc sera diffusé à travers le monde (et notamment en Afrique) par les Portugais au début du 17ème siècle.
Le manioc est aujourd'hui cultivé dans toutes les régions tropicales et sub-tropicales du globe :
Il occupe le 5 rang mondial parmi les plantes alimentaires (après le maïs, le riz, le blé et la pomme de terre).
Il est particulièrement consommé en Afrique subsaharienne sous forme de racines fraîches et de produits transformés.
La production mondiale est de 200 millions de tonnes. Les principaux pays producteurs sont le Nigeria, le Brésil, la Thaïlande, le Zaïre et l'Indonésie.
Le manioc est le produit de base de la nourriture de nombreux pays (Afrique, Asie, Amérique centrale et du Sud, Haïti), pour la sensation de satiété qu'il procure (près de 8 heures contre 3 pour le riz), mais il apporte peu de vitamines, d'éléments minéraux et de protéines.
Type
Le manioc est une plante herbacée à tiges noueuses et à racines tubéreuses (donnant des tubercules) se présentant sous la forme d'un arbrisseau de 1,5 à 3 m de haut. C'est une plante rustique qui s'adapte à tout type de sols et peut résister à la sécheresse.
Pour sa reproduction, on coupe des tronçons de tige de 20 à 30 cm que l'on couche dans le sol. La récolte se fait 6 à 12 mois après la plantation : les tubercules mesurent alors de 20 à 40 cm de long pour un diamètre de 4 à 10 cm, d'un poids de 2 à 5 kg.
En Afrique, quelques tubercules sont laissés en place pendant des années (jusqu'à 6 ans) en prévision d'une éventuelle disette : les tubercules mesurent alors 1 m de long pèsent jusqu'à 25 kg.
Il existe environ 40 variétés de manioc. Toutes contiennent de l'acide cyanhydrique, qui disparait à la déshydratation ou à la cuisson.
Les maniocs sont classés en « maniocs doux » (ka manioc) et « maniocs amers », en fonction de leur teneur en acide cyanhydrique. Ces 2 variétés sont consommables et transformables en tout type de produit, mais seuls les « maniocs doux » peuvent être consommés comme légumes (racines), après avoir été épluchés toutefois (car l'acide cyanhydrique est présent que dans la peau, au contraire des « maniocs amers » dans lesquels le toxique - manihotoxine qui, par hydrolyse, produit de l'acide cyanhydrique dit cyanure - est présent dans toute la racine).
Pour rendre ces derniers consommables, il faut les tremper dans l'eau (rouissage) plusieurs jours puis les sécher. Ou alors, les râper, puis les sécher ou les faire fermenter.
Les feuilles doivent aussi subir un traitement préalable à leur consommation : elles sont pilées puis bouillies 3 à 4 heures.
Fleur
-
Fructification
Récolte des rhizomes, toute l'année ++ octobre-novembre.
Fruit
Rhizome, tubercule à la peau fine de couleur marron foncé ou grise (peau non consommable), à la chair de couleur blanchâtre, jaunâtre ou rougeâtre selon les variétés.
Utilisations
Le manioc est consommé sous forme de :
- Farine de manioc (fécule, en fait, de par l'absence de gluten. Composition de la fécule : 75% d’amidon et de sucres, 2% de protéines).
Cette « farine » sert pour réaliser bouillies, galettes, croquettes, beignets, potages, ragoûts, pains et gâteaux.
- En Guyane, cette farine est appelée ‹ couac ›, elle tient une place culturelle importante.
- Au Brésil, le mot farine (farinha) désigne avant tout la farine de manioc et non celle de blé.
- En Afrique, la farine est appelée ‹ gari › (semoule finement granulée obtenue à partir de la pulpe de manioc fermentée, écrasée, tamisée puis desséchée au feu, couramment consommée au Bénin et au Togo.) et ‹ foufou › (Cameroun et au Congo). Entourée de feuilles et cuite à l'étuvée, la pâte donne des bâtons ou pain de manioc appelés « chikwangue » au Congo, et « mangbèré » en Centrafrique, aliment de base au Cameroun, au Congo et en Centrafrique.
- En Côte d'Ivoire on prépare ‹ l’attiéké › (semoule obtenue après plusieurs étapes de transformation du manioc s’étendant sur deux à trois jours - épluchage, broyage, fermentation, pressage, granulation, séchage, vannage-tamisage - puis cuisson à la vapeur).
- À l'île Maurice la farine est utilisée pour réaliser des biscuits, le plus souvent aromatisés à la cannelle, à la noix de coco ou encore au sésame.
- En Haïti, en Guadeloupe, comme dans de nombreuses îles antillaises et au nord-est de l'Amérique du Sud, on obtient la farine en râpant sur une grage le manioc lavé et épluché puis en pressant le mélange dans des tubes en osier ou tipitis, inventés par le Amérindiens. La bouillie du manioc (pulpe comprimée) est ensuite lavée et grillée à feu doux pour obtenir la farine de manioc.
- En Martinique et en Guadeloupe, cette farine est employée pour réaliser ‹ le féroce ›, à base de farine de manioc, d'avocat et de morue ainsi que les cassaves ou kassaves (galettes préparées avec la racine râpée de manioc, cuites sur des plaques chaudes).
- En Polynésie, la farine de manioc rentre dans la composition de plats traditionnels tels les ‹ po’e › (un mélange de purée de fruits ou de tubercules et de farine de manioc, cuit au four traditionnel dans des feuilles de bananier ou au four conventionnel, puis mélangé avec du lait de coco). Le ‹ tâota ›, un gâteau fait de coco et de manioc râpés et de lait de coco, dégusté en accompagnement de viandes ou poisson. Le ‹ rēti’a › un gâteau gélatineux à base de pâte d’amidon et de lait de coco cuit et grillé-caramélisé au four. Le ‹ ipo ›, un mélange de farine de manioc et de coco râpé, enveloppé dans des feuilles de ‹ auti › cordyline, et cuit à l’eau.
- Jus de pressage : Le pressage permet d'extraire le jus du tubercule. Ce jus entre dans la composition du cassareep, un conservateur de produits carnés, utilisés dans le pepperpot amérindien (ragoût préparé à partir de viandes, d'épices et de cassareep qui se conserve des années à condition de le faire bouillir une heure par jour après avoir rajouté la viande et le cassareep nécessaires).
- Légume-racine : Impérativement épluchée, puis lavée et coupée en morceaux, la racine du manioc doux est cuite à l'eau salée ou frite, cuisinée comme la pomme de terre.
- Feuilles : Les feuilles de manioc contiennent 7 % de leur poids frais en protéines. Celles de manioc doux se préparent comme les épinards ; celles de manioc amer doivent obligatoirement subir un traitement préalable à leur consommation : elles sont pilées puis bouillies 3 à 4 heures.
Les feuilles de manioc pilées sont mélangées avec des morceaux de poissons ou de viandes, de l’huile de palme et des épices pour donner le plat national du Congo, le « Saka Saka ». À Madagascar, les feuilles de manioc pilées servies avec du riz, des morceaux de viande (zébu ou porc) et mélangées à du lait de noix de coco forme le « Ravitoto ».
Le « matapa », plat typique du Mozambique et « le vatapá » au Brésil sont préparés avec les jeunes feuilles de manioc pilées avec de l'ail et la farine tirée des tubercules, cuites avec du crabe ou des crevettes. Aux Comores sous le nom de « mataba », les feuilles sont accommodées avec un émincé de poisson.
Au Brésil, elles entrent dans la réalisation du « maniçoba » (purée de feuilles cuites 4 à 8 jours avec des viandes salées et fumées).
- Boissons : Par fermentation on fabrique de l'alcool : « cauim » (bière améridienne) et « tiquira » (alcool de manioc, traditionnel dans les régions nord du Brésil), ainsi que du vinaigre.
- Tapioca (mot portugais vient du tupi et du guarani -langues indiennes du Brésil- et qui signifie résidu séché) : Le tapioca, aussi appelé perle du Japon, est une fécule de manioc amer, utilisée pour épaissir les soupes, les puddings, les crèmes ou les flans.
Son goût est neutre.
Les perles de tapioca sont utilisées en Chine pour le petit-déjeuner (sous forme de soupe épaisse) et dans la confection de plats sucrés/salés.
- À Taïwan, on trouve du thé au lait aux perles de tapioca (thé aux perles).
- En Amérique centrale et du Sud, le tapioca est utilisé dans la cuisine argentine, brésilienne, paraguayenne, péruvienne, mexicaine, et colombienne.
- Au Brésil et au Paraguay, il est utilisé pour la préparation de crêpes salées ou sucrées et au Mexique, pour faire un dessert semblable au riz au lait, en substituant le tapioca au riz.
- Le tapioca est utilisé par les personnes souffrant d'intolérance au gluten pour remplacer les farines en contenant.
- Le manioc est aussi traité industriellement par l'industrie agro-alimentaire : farine (adjuvant dans l'industrie de la bière), amidon (sirop de fructose, pain), ainsi que d'autres industries (colle, papier, ciment...).
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